Confinement : comment négocier son loyer commercial ?

Juridique et social -Publié le 03 Novembre 2020

 

 

 

Déjà impactés par le couvre-feu, les hôtels, bars et restaurants sont, pour la seconde fois cette année avec cette nouvelle période de confinement, victime d'une cessation ou d'une réduction d'activité forcée. Dès lors, négocier son loyer à la baisse devient vital pour la survie de l'entreprise. Baptiste Robelin, avocat spécialisé CHR au sein du cabinet Novlaw, avec Tiphaine Beausseron, vous donnent quelques pistes de réflexion pour mener à bien votre négociation.

Que négocier avec son bailleur ?

- Un étalement du paiement sur plusieurs mois.
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Un abandon partiel ou total du loyer.
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Une réduction temporaire ou définitive du loyer.
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La mise en place d’une clause de retour à meilleure fortune. Cette clause prévoit que le bailleur consent à abandonner une partie du loyer à un instant T, mais qu’il aura la possibilité, dans le futur, de réclamer de nouveau cette dette si la situation du locataire s’améliore. D’où le terme d’un “retour à meilleure fortune”. Il est logiquement souvent plus simple de convaincre le bailleur d’abandonner une partie de sa créance, s’il sait qu’il pourra éventuellement la recouvrer après la crise.
- Une prise de participation en échange d’une partie des dettes locatives. Il s’agit de convertir une partie de la dette locative en prise de participation au capital, à condition d’avoir de bons rapports avec son bailleur et que ce dernier manifeste également un intérêt pour l’activité exercée par son locataire. On retrouve souvent ce type de montages pour des sociétés de taille importante (groupes hôteliers, chaînes de restaurants, franchise, etc.).
- Des avantages en nature en compensation d’une partie des dettes locatives. Par exemple en consentant des nuitées d’hôtels ou des repas au bailleur et à sa famille. Rare mais possible. Attention toutefois au traitement fiscal et comptable de ce type d’arrangements, considérés généralement comme des produits constatés d’avance, qu’il faudra prendre en compte au bilan, en particulier s’agissant du traitement en matière de TVA.
- Une révision triennale du loyer à la baisse. Faculté ouverte aux deux parties et pouvant être invoquée par le locataire en période de crise, comme c’est le cas aujourd’hui. Ainsi, si un délai de 3 ans s’est écoulé depuis la dernière fixation-révision de votre loyer, il peut être pertinent de solliciter une révision à la baisse.

Quels arguments ou leviers utiliser ?

• L’article 1104 du code civil selon lequel les parties sont tenues, en cas de circonstances exceptionnelles, de vérifier si ces circonstances ne rendent pas nécessaire une adaptation des modalités d'exécution de leurs obligations respectives.
• Les incitations fiscales à l’abandon de loyer :

- l’article 3 de la loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances pour 2020 (Journal officiel du 26) qui élargit de façon exceptionnelle la déductibilité fiscale des abandons de créance aux abandons de loyers consentis entre le 15 avril 2020 et le 31 décembre 2020.

- Celle actuellement discutée devant le parlement pour être intégrée à la loi de finance pour 2021 qui consiste en un crédit d’impôt. Cette mesure concerne les entreprises de moins de 250 salariés fermées administrativement ou appartenant au secteur des CHR. Tout bailleur qui, sur les trois mois d’octobre, novembre et décembre 2020, accepte de renoncer à au moins un mois de loyer, pourra bénéficier d’un crédit d’impôt de 30 % du montant des loyers abandonnés. Cette mesure a été annoncée par le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, le 29 octobre 2020 (voir ci-dessous pour un exemple).

• Le bailleur, qu’il le veuille ou non, est associé aux difficultés de son locataire. En effet, si le preneur tombe en liquidation, non seulement le bailleur risque fort de ne jamais recouvrer le montant des arriérés locatifs accumulés (qui se trouveront gelés dans le cadre d’une procédure collective) mais surtout, en pleine crise, il n’est pas évident qu’il retrouve demain un nouveau locataire capable de payer les niveaux de loyer que l’on connaissait par le passé. À l’inverse, un accord équilibré, permettant aux cocontractants de passer cette crise sans précédent et assurera au bailleur le recouvrement, à terme, de tout ou partie des dettes locatives qui auraient pu s’accumuler à ce jour, et lui garantira le maintien d’un locataire avec un niveau de loyer fixé avant la crise. Accepter de négocier c’est donc du gagnant-gagnant.
• Accepter que loyer soit provisoirement en adéquation avec la baisse d’activité marque une véritable solidarité entre locataire et bailleur.
• Un commandement de payer ou une assignation pour défaut de paiement, n’entraîne pas systématiquement la résiliation immédiate du bail. Le locataire demandera et obtiendra dans la majorité des cas un délai pour règlement, qui peut aller jusqu’à deux ans.

Comment négocier ?

- Seul.
- Avec son avocat.
- Via le médiateur des entreprises (www.economie.gouv.fr/mediateur-des-entreprises).
- Via un mandataire had hoc.